Briac CHATELET
Le 4 avril 2025, la ville de Samarcande en Ouzbékistan accueillait le premier sommet entre l’Union Européenne et les cinq pays d’Asie centrale : Le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, le Turkménistan ainsi que l’Ouzbékistan. Cette rencontre symbolique s’inscrit de manière décisive dans l’évolution des relations mondiales autant pour l’Union européenne qui cherche de nouveaux partenaires que pour l’Asie Centrale qui s’ouvre graduellement au marché international. Retour sur les fondations du nouveau partenariat euro-centre asiatique.
Au cœur de ce sommet figure évidemment les intérêts économiques des deux régions. Depuis plusieurs années, les échanges entre l’Union européenne et l’Asie centrale ne font qu’augmenter. Le commerce bilatéral s’élevait à 59 milliards d’euros en 2023, soit une augmentation de 22,6% par rapport à l’année précédente. En détails, les exportations européennes vers l’Asie centrale ont quasiment doublé en 10 ans, marquant une augmentation de 99,5% entre 2014 et 2024 tandis que l’importation de marchandises a augmenté de 42,6% sur la même période. En tant que premier investisseur dans la région, l’Union européenne a investi pas moins de 100 milliards d’euros au cours des dix dernières années. Pour prendre un exemple, l’Ouzbékistan a multiplié par 3,6 ses exportations vers l'Europe, pour une valeur d’1,7 milliards d’euros tandis que ses importations ont augmenté de moitié. Afin de poursuivre dans cette voie, la Commission européenne a profité du sommet pour annoncer un investissement de 12 milliards d’euros en accord avec l’initiative Global Gateway. Visant à améliorer le transit des marchandises, ce plan se découpe en plusieurs segment : 3 milliards d’euros seront destinés au développement des transports, 2,5 milliards d’euros à l'exploitation des matières premières critiques, 6,4 milliards d’euros aux infrastructures hydrauliques et environnementales et les millions restants à la connectivité numérique du projet.
Plus qu’une simple initiative économique, ce sommet joue également un rôle diplomatique. En intégrant un cadre de coopération politique régulier, l’UE entend promouvoir des normes de sécurité collective ainsi qu’un dialogue sur de nombreuses thématiques. Parmi elles, l’importance de la transition énergétique, de la lutte contre le terrorisme et la cybercriminalité afin de garantir la stabilité de la région. Plus que cela, ce sommet permet d’officialiser le rapprochement entre cette région stratégique et l’Europe. Au cœur des rivalités, entre la Russie, l’Iran, la Chine ou encore la Turquie, l’Asie Centrale pourrait devenir un partenaire de choix pour Bruxelles, surtout dans le contexte des nouvelles dynamiques internationales. Pour favoriser ce partenariat et réduire l’isolation de la région, l’Union a également annoncé son soutien au corridor Trans-Capien permettant de traverser la mer Caspienne plutôt que la Russie, réduisant à 15 jours au lieu de 30 la durée d’acheminement des marchandises. De fait, les chaînes d’approvisionnement eurasiatiques seraient bien plus sécurisées.
En effet, ces nations regorgent de ressources naturelles rares et vitales pour la transition énergétique. Par exemple, le Kazakhstan détient 12% des réserves mondiales d’uranium, 38% de celles du chrome ainsi que d’importants minerais de manganèse et lithium. Le Turkménistan possède la 4ème plus grande réserve de gaz naturel au monde tandis que l’Ouzbékistan dispose de la 4ème réserve mondiale d’or ainsi que d’importantes quantités d’uranium et de gaz. Enfin, le Kirghizistan et le Tadjikistan regorgent de terres rares. Pour une Union européenne dépendant à 90% des réserves stratégiques chinoises, la diversification de ses sources d’approvisionnement est vitale.
Toutefois, les avantages de partenaires comme ces pays ne doivent pas occulter le besoin de réformes des Droits de l’homme dans la région. Même si quelques réformes ont eu lieu, notamment au Kazakhstan, de nombreuses atteintes aux libertés civiles et politiques demeurent. Au Kirghizistan, une loi répressive contre les ONG est en cours d’examen tandis que des déplacements forcés de population en Ouzbékistan ont été documentés. De manière générale, les régimes d’Asie centrale demeurent assez fermés et maintiennent une politique que l’on peut juger répressive à l’encontre des opposants. Pour Amnesty International, il est vital que l’Union Européenne maintienne la pression sur l'évolution des Droits de l’Homme dans la région.
L’Union Européenne maintient donc sa nouvelle politique extérieure, ouvrant un nouveau chapitre prometteur des relations euro-asiatiques après la reprise des négociations sur l’accord de libre-échange avec l’Inde.
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