Un engagement allemand pour l’Europe réaffirmé ?

Briac CHATELET

         Le 23 février 2025, le futur chancelier allemand Friedrich Merz avait déclaré à la télévision nationale qu’il était temps pour l’Europe de prendre son indépendance face à « l’ingérence américaine ». Un mois plus tard, lors du congrès du Parti populaire européen à Valence le 29 avril, le leader des chrétiens-démocrates allemands s’est engagé à diriger « le gouvernement le plus pro-européen » de l’histoire allemande. Retour sur la nouvelle esquisse de la politique étrangère allemande. 

Historiquement pro-atlantiste, l’Allemagne a maintenu un soutien indéfectible à l’influence de Washington dans sa politique de défense depuis la Guerre Froide. En 2007, lorsque l’idée d’un partage du parapluie nucléaire avait été proposé, avec la France et le Royaume-Uni, le gouvernement d’Angela Merkel s’y était fortement opposé. Vu comme une tentative de distanciation de l’Europe vis-à-vis des États-Unis, tout initiative similaire avait été rejeté. Le refus d’adhérer au projet « d’armée européenne » proposé par Emmanuel Macron ou encore l’inquiétude exprimée quant au retrait partiel des garnisons américaines en 2019 ne sont que quelques exemples de la crainte d’une distance transatlantique, si ce n’est d’une trop grande dépendance allemande envers Washington. Cependant, à l’issue d’un mandat du SPD jugé trop tourné vers la politique nationale, l’Allemagne semble s’engager dans une démarche proactive envers Bruxelles. 

Pour Friedrich Merz, l’Europe est « menacée de l’extérieur par une guerre impérialiste menée à l’Est ». Alors que l’Allemagne a annoncé une relance de son industrie de défense avec un investissement à hauteur de 100 milliards de dollars, la nouvelle chancellerie a annoncé confier la gestion des affaires étrangères à un membre issu de son propre parti – fait rare pour un gouvernement de coalition en Allemagne. Avec la nomination de Johann Wadephul, Berlin entend bien confirmer son engagement envers l’Ukraine. Mais cela ne passe pas simplement par un renforcement de la Bundeswehr, bien au contraire. Pour le futur chancelier, l’Allemagne doit abandonner « son attitude moralisatrice » à l’égard de l’Union Européenne. Cela signifie donc un élan de coopération constructive au sein des instances européennes surement après les décisions controversées du gouvernement Scholz : déclaration unilatérale pro-Otan lors du discours de Prague de 2022, lancement du projet « European Sky Shield » avec des technologies américaines sans l’accord français ni italien, plan de soutien massif au bouclier énergétique allemand lors de la crise énergétique sans coordination européenne…

Berlin veut donc aller de l’avant et garantit que « l’abstention à Bruxelles doit désormais appartenir au passé ». Rappelant à l’ordre Viktor Orban et son obstructionnisme par la même occasion, Friedrich Merz assure son soutien aux projets commerciaux européens tel que celui que nous avions couvert sur l’Inde mais également ceux très attendus avec le Mercosur. Toutefois, s’alignant sur l’agenda de Bucarest du parti populaire européen, il appelle à simplifier la réglementation européenne, durcir la politique migratoire tout en confirmant sa volonté de consolider la défense européenne.

 Il reste donc à voir si ses engagements vont bel et bien porter leurs fruits avec un nouvel élan allemand. Si l’on peut s’attendre à un partenariat de défense accru entre l’axe de Weimar (France, Allemagne, Pologne), il est nécessaire d’attendre l’apparition de contradiction entre les intérêts allemands et européen avant de se prononcer.

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