La crise anti-corruption serbe.
Briac CHATELET
Ce mardi 4 mars 2025, l’assemblée serbe a été perturbé par le jet de plusieurs fumigènes et gaz lacrymogènes par des députés de l’opposition. Cet acte s’inscrit dans la continuité des manifestations anti-corruption que connaît la Serbie depuis plusieurs mois, déstabilisant le gouvernement d’Aleksandr Vukic. Derrière ces manifestations anti-corruption et une déstabilisation du pouvoir en place ayant causé la démission, un simple accident de gare a entraîné la Serbie dans une grave crise politique.
Le 1er novembre 2024, le toit de la gare de Novi Sad en Serbie s’effondre et cause la mort de 15 personnes. Si l’incident est rapidement traité par les autorités, la presse et la population locale s’interrogent sur les causes de cet effondrement. Pour beaucoup, il ne s’agit pas d’un accident mais bien d’une faute directement imputable à l’État Serbe. La gare de Novi Sad, deuxième ville de Serbie, venait à peine d’être rénovée après de longs travaux représentant un coût de 65 millions d’euros. Si la somme est premièrement jugée trop importante par la population pour les travaux envisagés, le choix des contractants par les autorités publiques suscite également le débat. En effet, les entreprises chinoises China Railway International et China Communication Construction sont choisies au détriment de constructeurs nationaux, créant l’indignation du public ainsi que des cercles universitaires, opposés à la politique jugée autoritaire et corrompue du président serbe Vukic. L’effondrement du auvent de la gare suscite alors l’indignation du public, accusant les autorités serbes d’avoir conclu un contrat non fiable et mettant à risque la vie des usagers par leur corruption.
Depuis Novembre 2024, la Serbie connaît donc une série d’importantes manifestations, rassemblant des dizaines de milliers de personnes. Menées par les étudiants serbes, cette vague de contestation appelle à une transparence et une réforme de l’État. La situation va d’abord être gérée de manière très agressive par le gouvernement, avec des arrestations massives d’étudiants. Dans un premier temps, le gouvernement choisit de garder une ligne autoritaire, allant même jusqu'à refuser de condamner un automobiliste ayant refusé de s’arrêter face à la foule, jugeant qu’il a simplement “choisi de poursuivre son chemin”. Rapidement, les partis d'opposition vont ouvertement critiquer la politique choisie, forçant le gouvernement à faire marche arrière et condamner toute forme de violence envers les manifestants. Sans surprise, le mouvement ne va en être que renforcé, générant des regroupements en soutien à travers l’Europe ainsi qu'à New York et plongeant l’éducation nationale, les ouvriers ainsi que les agriculteurs serbes dans une grève généralisée.
Le 27 janvier, le Président Aleksandr Vukic s’adresse à la nation et annonce une réponse aux revendications étudiantes en quatre points : transparence sur l’incident de la gare de Novi Sad, mise en examen des responsables de l’incident, arrestation des responsables de violences commises envers les étudiants et augmentation du budget de l’éducation nationale serbe. Dans la foulée, le Premier Ministre Milos Vucevic et le maire de Novi Sad, Milan Duric, annoncent leur démission. Malgré cela, le mouvement ne fait que s’agrandir, rassemblant un soutien proclamé de “80% de la population”, touchant toutes les catégories d’âges et de profession. Face à un accroissement de la pression gouvernementale visant les travailleurs ainsi qu'à des descentes de police dans les locaux d’associations pro-manifestations, les étudiants tiennent bon et annoncent leur édit.
Dans leur proclamation du premier mars, les étudiants appellent à l’indépendance des universités, de la justice, des médias et à la valorisation des droits humains, rappelant que la Serbie est “un pays de gens libres” dans lequel “les institutions doivent servir le peuple et être un fondement de la confiance”. C’est donc dans ce contexte que l’opposition parlementaire a perturbé la session législative du 4 mars, appelant à ce que “ la Serbie se lève pour que le régime tombe”.
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