L’investissement de TSMC aux États-Unis, une métamorphose du bouclier Taiwanais ?

Briac CHATELET

Ce 3 mars 2025, TSMC annonçait la mise en place de son plan d’investissement de 100 milliards de dollars américain aux États-Unis. Ce plan, destiné à l’Arizona, servira à développer le parc industriel de l’entreprise dans l'État américain au sein duquel trois fonderies sont déjà fonctionnelles. Dans un contexte d’inflation tarifaire depuis le retour de Donald Trump à la présidence, ces nouveaux investissements sont à mettre en relation avec les changements que rencontrent du Bouclier de Silicium taiwanais depuis le Chips and Science Act. Retour sur l’actualité du plus gros acteur du marché vital des semi-conducteurs, Taiwan Semiconductor Manufacturing Company.

Fondée en 1987 à Taiwan par Morris Chang, TSMC est le fruit d’une volonté nationale de se moderniser et de se spécialiser dans une industrie prometteuse, les semi-conducteurs. Aujourd’hui indispensable, cette maîtrise technologique confère à Taiwan un “Bouclier de Silicium”, vital dans les tensions l’opposant à la République populaire de Chine. Pourtant derrière cette réussite se cache d’importants investissements américains. Depuis la crise du covid et l'interruption de nombreuses chaînes d’approvisionnements, les États-Unis ont amorcé un rapatriement de leurs actifs. Dans cette optique, le Chips and Science Act de 2022 a été signé afin de concentrer sur le sol américain les investissements américains afin de garantir une sécurité économique, conférant un approvisionnement stable et une opportunité d’emploi. C'est donc dans ce cadre que Taiwan a vu apparaître une demande grandissante d’implantation d’une part de ses activités sur le sol américain. Cet investissement de 100 milliards, suivant un premier de 65 milliards marque donc l’érosion de ce bouclier national face à la pression américaine.

Cette annonce est également importante dans le cadre des tensions tarifaires entre les États-Unis et ses partenaires commerciaux. Pour rappel, l’administration Trump mène actuellement une politique économique visant à hausser les frais de douanes à l’encontre de ses partenaires commerciaux, qu’ils soient frontaliers comme le Canada et le Mexique ou bien transatlantique. Lorsque le président de TSMC C. C. Wei annonce cet investissement après un entretien avec Donald Trump le 3 mars, ce dernier s’en est réjoui et a commenté l’opération : “ Cet investissement permettra de créer des milliers d’emplois très bien payés” avant que le Secrétaire au Commerce Howard Lutnick n’ajoute que : “Les entreprises viennent ici investir beaucoup d’argent parce qu’elles veulent être dans le plus grand marché du monde et elles veulent éviter les droits de douane qu’elles subiraient si elles n’étaient pas installées ici”.

Toutefois, cet investissement est à préciser. Premièrement, il ne s’agit pas d’investir à hauteur de 100 milliards pour l’année 2025 mais plutôt à compter de cette année et ce sur quatre ans. Les autorités de l’Arizona devront donc attendre avant de voir éclore un nouveau parc industriel à la hauteur de cette somme. De plus, cette opération n’est pas à assimiler à une véritable délocalisation. En effet, afin de protéger son bouclier, TSMC compte bien conserver ses usines les plus précieuses sur le sol Taiwanais. De cette façon, la Chine hautement dépendante de cette industrie pourrait être réticente à l’idée de recourir à la force des armes. Le premier ministre taiwanais Cho Jung-Tai a confirmé l’intention de voir Taïwan conserver son rôle clé dans l'industrie des semi-conducteurs à l’avant-garde de l’intelligence artificielle hautement dépendantes en semi-conducteurs. Toutefois, afin de satisfaire les velléités américaines, TSMC a choisi d’approcher Intel afin de redresser l’entreprise américaine dont les difficultés avaient attisé le ressentiment du Président Trump à l'égard des concurrents taiwanais. En effet, après la

rencontre du 3 mars, la direction de TSCM a choisi de proposer une codirection des fonderies d’Intel aux entreprises de semiconducteurs américaines à savoir Qualcomm, Advanced Micro Devices ou encore Broadcom.

Si cette opération venait à voir véritablement le jour, une scission des fonderies d’Intel pourrait avoir lieu entre ces entreprises, redressant un géant américain tout en assurant un abri potentiel pour TSMC face aux foudres de la nouvelle administration américaine.

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